Par Charles Barachon
DESIGN L'ère du design 100% industriel, tout comme le règne du plastique et du métal, n’est pour eux qu'un lointain souvenir. Le duo Formafantasma, qui a vu le jour dans le pays où Johan Cruyff a inventé le football total, à la Design Academy d'Eindhoven plus exactement, ne jure que par le végétal, le minéral et l'animal.
Pas plus Bataves que François Hollande, Simone Farresin (né en 1980) et Andrea Trimarchi (né en 1983, photo du haut), Italiens bien sûr, sont devenus en quelques années les coqueluches d'un design expérimental qui se tient au plus près de mère nature et du fait main.
Quand ils conçoivent de la vaisselle, ils appellent donc l'entreprise Poilâne et la fabriquent avec 70% de farine, 20% de déchets agricoles et 10% de calcaire, le tout étant livré avec un manuel de production célébrant le do it yourself et l'esprit local.
Leur design en marge, pointu et spectaculaire, attire autant les marques que les galeries spécialisées. Fendi, en tête, les a invités à produire la collection Craftica, alors que la galerie Libby Sellers de Londres s'est notamment chargé de vases et boîtes en verre de Murano et pierres de lave de l'Etna, issue de sa dernière éruption du volcan en 2013. Un recyclage habile du déchaînement des éléments naturels.
Passionnés par les traditions ancestrales, Farresin et Trimarchi se sont aussi amusés de l'utilisation par les Egyptiens de l'Antiquité du charbon pour purifier l'eau : leur version contemporaine du filtre à eau est l'exemple parfait de leur sensibilité poétique et leur goût de l'aventure.
Plus radical, ils ont déjà fait : le cuir, chez eux, s'entend aussi en termes de peaux de poisson. Celles du saumon et de la perche enrobent les manches des cuillers de la série Craftica au look aussi préhistorique que super moderne. Leurs récipients à eau en vessies de cochons ou de vaches ne le sont pas moins. Dans la catégorie « expérimentation de la matière », on peut avoir une certitude : Formafantasma sera très dur à détrôner.