Fondée en 1877, Cosmydor promeut dès sa création des produits composés exclusivement de végétaux. Près d'un siècle et demi plus tard, la marque de cosmétiques, relancée en 2018 par Xavier Quattrocchi-Oubradous, effectue un sans faute dans la fabrication de ses crèmes et de ses packagings. Premier volet d'un interview 100% naturelle de petites marques qui voient la beauté en grand.
Xavier Quattrocchi-Oubradous, en 1877, à une époque qui s’en souciait peu, la première formule de Cosmydor était « 100% naturelle ». C'est-à-dire?
C’est à dire qu'elle était composée entièrement de végétaux – nous n'avons malheureusement pas retrouvé la formule d’origine. A l’époque, la plupart des produits de soin et d’hygiène pour la peau étaient formulés avec des vinaigres et autres acides.
Qu’avez vous injecté à cet héritage ?
Si nous reprenons et poussons le concept de naturalité plus loin avec le tout « bio », nous avons injecté dans l’ADN de la marque l’écoresponsabilité. Un concept récent né en réaction aux multiples pollutions que nous imposons à la planète par nos habitudes de consommation.
Qu’entendez-vous sous le terme « cosmétique vertueuse » ?
Deux choses. La première que nous regroupons sous le concept d'efficacité de l’artisanat. Nous sommes persuadés que les cosmétiques fabriqués à la main sont infiniment plus efficaces que ceux qui sortent d’une usine. L’artisanat permet d’utiliser une concentration et une qualité d’ingrédients actifs – notamment des huiles végétales vierges, non raffinées – que la machine ne tolère pas. On parle ici de concentrations en actifs de 10 à 25 fois plus élevées (par exemple de 36 à 99% dans nos crèmes ou baumes) que dans la cosmétique conventionnelle, ce n’est pas marginal.
Et la seconde ?
La seconde se résume par la beauté de l’écoresponsabilité. Malgré les multiples contraintes et les surcoûts, le respect obsessionnel de Cosmydor pour la planète et pour l’humain nous a poussé à penser et agir différemment : refuser les emballages plastiques pour ne choisir que des emballages en verre et en aluminium, plus nobles et plus esthétiques. Refuser des fragrances et opter pour des soins qui sentent littéralement les plantes qui les composent.
Renvoie-t-il aussi à l’idée de cercle vertueux qui dépasse votre ligne de cosmétique – par exemple en touchant l’ensemble de la chaine de production ?
Bien entendu : la production est vertueuse, sans gâchis d’eau, sans gâchis d’énergie, en utilisant un savoir-faire manuel, humain, noble et français. La production est conçue en symbiose et non en opposition avec la nature. Plus largement, nous avons repensé chaque maillon de la chaîne de valeur d’une entreprise cosmétique pour le rendre plus écoresponsable, depuis l’approvisionnement en matière première jusqu’à la livraison chez nos clients. C’est fastidieux et coûteux, mais nécessaire.
L’idéal serait un emballage réalisé à 100% avec des végétaux bios faciles à cultiver
Pouvez-vous préciser les avancées sur les emballages réalisés à partir de matière végétale et en quoi c'est mieux que le verre ?
En théorie, l’idéal serait un emballage réalisé à 100% avec des végétaux bios faciles à cultiver ou à trouver, fabriqué avec peu d’énergie, sans gâchis d’eau, sans pollution et avec une esthétique satisfaisante et facilement compostable. Hors coût de transport, il aurait un bilan carbone négatif, ce qui n’est pas le cas du verre ou de l’aluminium. Nous n’avons pas encore trouvé de solution avec toutes ces caractéristiques, mais nous pensons que c’est juste une question de temps.
Vous évoquez votre « symbiose avec la nature ». Justement, Hélène Valade, directrice Développement Environnement du groupe LVMH, affirme que « dans vingt ans, le luxe aura une relation beaucoup plus intime avec la nature » et qu’il « aura renforcé ces caractéristiques originelles : la rareté et l’éternité ». Qu'en pensez-vous ?
C’est très bien dit. J’y ajouterais parmi les caractéristiques originelles du luxe le savoir-faire artisanal : lui seul apporte un supplément d’âme, similaire à la création artistique, que l’industriel n'atteindra jamais.
Vous dites que vos packagings sont sourcés régionalement. Qu'est ce que cela signifie concrètement ?
99,5% des emballages de Cosmydor proviennent d’Europe de l’ouest : verrerie des Pays-Bas et de Belgique, cartonnage de Belgique, tubes aluminium du Portugal, imprimerie de France. Ils n’ont pas fait trois fois le tour de la planète avant d’être livrés à notre labo de Vierzon puis terminer entre vos mains.
Nous sommes deux à trois fois plus élevés que d’autres marques haut de gamme
Quels sont les surcoûts en pourcentage par rapport à des produits cosmétiques basiques et comment les amortissez-vous ?
Je ne connais pas les coûts des produits cosmétiques basiques donc il est difficile d’évaluer le différentiel, mais le multiple est probablement colossal. Nous savons que nous sommes déjà deux à trois fois plus élevés que d’autres marques haut de gamme. Ces coûts restent acceptables car nos prix de vente, sur un segment luxe, permettent encore des marges suffisantes. Nos distributeurs jouent le jeu et acceptent des marges assez basses pour nous référencer. C’est un choix : produire à la main en France coûtera toujours plus cher, idem pour du beau verre sérigraphié par rapport à du plastique. L’efficacité du soin pour la peau et la protection de la planète le justifient.
Nous suivons de près les progrès des emballages réalisés à partir de matières végétales
Comment fonctionne la R&D dans une « petite » marque de la cosmétique ? Avec qui travaillez-vous par exemple pour la recherche de nouveaux matériaux remplaçant le plastique ?
Nos moyens sont minuscules par rapport aux géants du secteur. Nous n’avons aucun levier économique à utiliser par rapport à des fournisseurs, nous ne pouvons que faire appel à leur bon sens et marteler des tendances de long terme. Mais les solutions, même imparfaites, existent déjà, notamment avec le verre et l’aluminium. Nous suivons de près les progrès des emballages réalisés à partir de matières végétales. Les innovations se sont accélérées depuis quelques années, c’est très prometteur, mais ça n’ira à son terme que si les grands groupes jouent authentiquement le jeu sans y voir juste des opportunités marketing.
Quels sont d’ailleurs en la matière les avantages à être un label confidentiel ?
Aucun, c’est pour cela que nous sommes de moins en moins confidentiels grâce à une expansion rapide de notre distribution en France et à l’international.
La suite de l'entretien avec Xavier Quattrocchi-Oubradous dans un prochain post.