Par Judith Spinoza
FUTURS « Ce qui pouvait être un “nice to have” est désormais devenu un “must have” », explique Stéphanie Achard, managing director retail de Microsoft pour l’entité Grandes Entreprises. En clair, le commerce digital s’impose durablement comme la nouvelle façon de consommer.
La Fédération du e-commerce et de la vente à distance confirme l’envolée des chiffres : les ventes en ligne ont progressé de 8,1% au troisième trimestre 2020 ; un tiers des Français ont acheté des articles de mode sur Internet entre les deux premiers confinements ; par ailleurs, souligne la FEVAD, « depuis le mois de janvier, l’augmentation du canal web des magasins est trois fois plus importante que pour la même période en 2019 (+41% vs +13%) ». Alors, comment consomme-t-on aujourd'hui de son canapé ?
LES VIRTUAL STORES
A défaut de pouvoir s’y rendre, les boutiques de luxe viennent à nous de façon virtuelle, comme Dolce & Gabbana, Delvaux ou Ralph Lauren. La cosmétique n'échappe pas à la tendance – Dior Parfums, Clarins, Charlotte Tilbury – avec pour objectif de recréer de la proximité avec ses clientes.
« Dans une boutique virtuelle, note Laure Braive, consultante spécialisée dans le développement de contenus et d’expériences client pour marques d’exception, on arrive à créer une expérience qui est beaucoup plus centrée autour de la flânerie et de la découverte qu’avec le display par produit d’un e-shop classique. »
LE LIVE SHOPPING
Entre e-commerce et divertissement, cette technique de vente online permet aux utilisateurs des réseaux sociaux et des plateformes d’acheter en direct des produits présentés par un influenceur ou par un vendeur dans une vidéo diffusée en streaming.
Cartier a créé la surprise en organisant un live-stream exclusif en Chine sur l’ interface luxe TMall Luxury Pavilion d’Alibaba. Elle a rassemblé 770 000 téléspectateurs et les ventes ont dépassé la barre symbolique des 100 millions de yuans (près de 13M€) !
Très développée en Asie, cette technique permet un taux d’engagement élevé et rencontre un succès grandissant auprès des consommateurs. Si elle est encore peu commune en Europe, certains ont tout de même tenté cette approche : les Galeries Lafayette ont lancé des live shopping dès mai 2020. A l’automne, la marque de lingerie Livy a été la première en France à la proposer avec un rendez-vous hebdomadaire diffusé en exclusivité sur le compte Instagram @livystudio.
LE V-COMMERCE
Il utilise les réalités virtuelles ou augmentées. Pour tester sans se rendre en boutique, la marque horlogère Fossil a lancé, en décembre 2020, une nouvelle fonctionnalité qui permet à un utilisateur d’essayer virtuellement une montre à son poignet sur plusieurs canaux, dont Fossil.com et la plateforme Watch Station.
Un mois plus tard, le grand magasin londonien Browns Fashion, qui s’était déjà essayé à l'essayage virtuel de sneakers avec Virtual Try On, a repris ce principe pour des montres de luxe. « Le potentiel est énorme pour améliorer l’expérience shopping, a ainsi expliqué Mohammed Said, son directeur de la technologie et des produits. La pandémie mondiale empêchant l’expérience shopping physique, nous avons accéléré notre investissement dans cet espace. »
Côté cosmétique, ces usages s’accélèrent avec Signature Face de l’Oréal ou Chanel Try On.
DES CATALOGUES MODÉLISÉS EN TAILLE RÉELLE
Ikea, qui a annoncé en décembre la fin de son catalogue papier, s’est doté d’une nouvelle enveloppe de 250 millions d’euros consacrée au digital pour notamment renforcer la planification à distance des cuisines ou du coaching en décoration par visioconférence. « Ces solutions se perfectionnent, détaille Adrien Zanelli, cofondateur de la plateforme Retail VR. Demain, il sera commun de capter des environnements virtuels et de mettre en place des objets 3D dans des environnements réels, créant de fait de nouvelles expériences pour le consommateur. »
Pour autant, la pandémie a généré un sursaut éthique du consommateur : il se tourne parallèlement vers les commerces de proximité ou les réseaux locaux. On consomme donc de chez soi, mais aussi près de chez soi. Une consommation plurielle.