IDÉES Cet été, les it bags et les it shoes des créateurs ressemblent de près à des accessoires que vous auriez pu acheter dans une boutique de plage ou un supermarché. Au bras, des sacs « retour de marché », des paniers en osier, des tote bags en filet et des cabas de courses.
Aux pieds, des claquettes de piscine (signées Dolce&Gabbana, Saint Laurent, Jil Sander ou Isabel Marant), des espadrilles ou des mules assez proches de celle de votre mamie à Palavas.
Parmi les pièces du printemps-été les plus prisées, le sac bleu de Balenciaga Carry Shopper, vendu plus de 1 000 € (et sold out), a de faux airs du sac utilitaire Frakta d’Ikea, vendu moins d’un euro en magasin. Le web s’est amusé de cette ressemblance en détournant le fameux sac en vêtements sur les réseaux sociaux. Et Ikea a répondu de façon décalée à Balenciaga en proposant un mode d’emploi pour distinguer l’original du copycat.
Ce coup de maître est signé Demna Gvasalia, coutumier du fait. L’année dernière, sa marque Vetements a en effet proposé des tee-shirts DHL et des collaborations avec des marques bon marché comme Champion.
Autre esthétique cheap en vogue, celle du « chique chique ». Pour sa dernière collection Gucci, présentée fin mai à Florence, le créateur Alessandro Michel a rebaptisé son logo en Guccy comme un clin d’œil aux contrefaçons vendues sur le marché de Vintimille.
Et les récents sacs Jeff Koons pour Louis Vuitton évoquent pour certains internautes des faux qu’on peut se procurer sur des marchés peu scrupuleux.
S’agit-il là de provocation à la manière du défilé Dior à l’inspiration SDF de Galliano en 2000 ? D’une réflexion sur un luxe moins sage, « top down » et statique ? D’une tentative punk pour séduire les millenials ? Ou d’un hommage à la rue qui toujours inspiré le catwalk ?
Il se pourrait qu’il s’agisse d’un constat plus profond : avec la précarité grandissante, les recessionistas misent sur le confort (d’où l’hégémonie du street-luxe et de l’athleisure), ne pouvant plus se permettre de sacrifier un bras pour de l’importable. On peut mettre beaucoup plus de choses (des livres ?) dans un cabas géant en cuir Céline que dans une minaudière de soirée. Et les féministes 2.0 marcheront beaucoup mieux en claquettes strassées qu’en talons de 15.