Par Charles Barachon
DESIGN A l'époque de la Victoire de Samothrace, chef-d’œuvre inégalé de la sculpture antique grecque, le marbre avait déjà le vent en poupe depuis des lustres. La finesse de grain et la transparence réputée de la pierre blanche de Paros, une île des Cyclades, avaient alors décroché le ticket gagnant pour incarner Niké, la déesse ailée. Vingt-trois siècles plus tard, le design contemporain fait de nouveau du marbre l'un de ses favoris.
On l'associe au cuivre et au jaune chez Sebastian Herkner (tables Salute pour La Chance, photo du haut), alors que l'agence d'architecture OMA de Rem Koolhaas a choisi une pépite venue d'Iran, un somptueux marbre beige foncé, pour le sol de la nouvelle galerie de la Fondation Prada, à Milan.
Marbre Portor, blanc de Carrare, bleu turquin, rouge Alicante, noir Marquina ou brun Emperador, il faut reconnaître que la roche métamorphique porte en elle une élégance intemporelle, défie l'usure et sait profiter de ses allures organiques. Une équation qui plaît beaucoup en ce moment.
Avant les années 2010, quelque icônes avaient cependant fait fureur : la déclinaison en marbre de la série Tulipe de Saarinen, en 1957, ou encore le canapé monolithique Memphis Agra d’Ettore Sottsass (tissu de Nathalie du Pasquier), en 1982.
Chez Guillaume Delvigne, il est discrètement célébré et accompagné d'un plateau en résine pour un ensemble très contemporain (table Vesta, pièce unique) ou traité à la manière d'une sculpture moderne (tabouret Rift, Tools).
Classique réinventé à l'infini, le marbre fait scintiller ses couleurs comme un paon dans la très belle table Split de Francesco Meda. On tente même parfois de l'imiter : la chaise en béton teinté de Pettersen & Hein serait presque à s'y méprendre.
Toujours à l'honneur sur le terrain esthétique, les jeunes designers démultiplient également sa beauté et la richesse de ses textures dans une série de bouts de canapé (Jonathan Zawada) et d'étagères murales (Muller van Severen). Plus qu'un festival, le marbre est un triomphe !