Par Charles Barachon
DESIGN Le charme du métal oxydé plaît décidément aux designers. Alors que la catégorie « fait main » ou le bois naturel continuent de séduire, l'oxydation, cette patine chimique de la matière, rejoint en toute logique une tendance qui s'oriente, en particulier dans le design, vers le naturel et la noble lenteur.
Un effet de matière singulier que l'on retrouve à l'état presque primitif dans les plateaux en cuivre de la série 19 d'Omar Arbel, obtenus grâce à une technique ancienne de fonte du métal au sable de moulage.
Leur finition miroir poli contraste avec la couronne de matière hyper texturée, façon pierre de lave, qui les coiffe après avoir été oxydée par l'air. D'ordinaire retirée, ce volume altérée trouve ici une place de premier choix.
Autre héritage, celui de l'industrie lourde traditionnelle, notamment à l’œuvre dans le look et le graphisme des cabinets jaunes en zinc du duo formé par Jan Plechac et Henry Wielgus, qui ont su allier à merveille la noblesse de la patine avec le chic des années 2010.
Même la laine et la soie s'oxydent et ne résistent pas moins à l'ode à la transformation de la nature minérale. Chez les Anglais de Knots Rugs, le tapis en laine et soie de la série Knots Abstract (photo du haut et ci-dessous) imitent à la perfection le métal ouvragé par le temps.
Mais quoi de mieux qu'un miroir pour mettre l'oxydation en scène ? Constance Guisset a préféré l'artifice et les expériences chromatiques et donné à son miroir Francis des allures de composition colorée sinuant en milieu aqueux.
A la fois témoins de son histoire et révélateurs d'une beauté imparfaite, les lentes altérations de la couche argentée d'un miroir créent des points colorés allant du doré au brun, du violet au bleu.
Pour son ensemble de miroirs géométriques et de vases bichromes, Lex Pott s'approprie quant à lui le principe chimique pour l'accélérer et le figer dans de très beaux objets. Une tendance, on le voit, vraiment pas rouillée.